par Jacques Halbronn
Franck Nguyen a publié récemment un ouvrage sur analogie et astrologie. On reproduira ci-dessous un texte dans lequel il s’efforce de définir ce qu’il entend par analogie
« La loi d’analogie
DEFINITION GENERALE DE L’ANALOGIE
L’analogie signifie dans le langage courant correspondance. Cependant, toute correspondance n’est pas analogie au sens traditionnel du terme. Étymologiquement, analogie signifie « parole, discours » (du grec, logos) en rapport avec « le haut » (du grec, ana-), donc procédant de ce dernier. Le Logos doit être compris comme connaissance. Le rattachement de celle-ci à la parole se fait par imitation (par analogie justement) du Verbe divin, présent dans toutes les traditions et à l’origine du monde, qu’il s’agisse du Aum hindou, du Verbe des traditions chrétiennes, du Ki extrême-oriental se manifestant en premier lieu sous la forme d’un son… Notons également que la présence d’un haut implique celle d’un bas. Dans le préfixe « ana- » est donc supposée une relation entre le haut et le bas.ANALOGIE, PRINCIPE ET CENTRE
Il convient, pour comprendre la portée de la définition de l’analogie, de souligner que l’entièreté du monde dans lequel nous vivons apparaît comme un reflet de principes supérieurs. Chacun de ces principes se manifeste via de multiples correspondants dans les corps, les pensées, les actions, etc. Ainsi, le principe de cyclicité se retrouve dans de multiples individus par exemple, tant corporellement, que mentalement, que dans les types d’actions, etc. Les circulations sanguine et nerveuse, les modifications émotionnelles, les actions répétitives en forment des illustrations. Le « microcosme » n’est pas seul concerné. A une échelle plus élevée, le « macrocosme » obéit aux mêmes lois cycliques : cycles quotidien, mensuel, annuel, général (embrassant l’existence). « Microcosme » et « macrocosme » sont bâtis en analogie. Nous retrouvons en divers sens le bas correspondant au haut. L’analogie, procédant du haut vers le bas, consiste donc à partir des principes pour les appliquer aux conditions de notre monde. Quant à la démarche d’apprentissage de l’analogie, elle part de ce qui est immédiatement accessible pour nous, vu notre état humain, pour remonter vers les principes. L’observation, exercée à partir des connaissances d’ordre doctrinal, forme un bon support. En menant celle du couple humain, par exemple, nous retrouvons la polarité masculin – féminin, d’ordre universel, nommée yang – yin dans la terminologie extrême-orientale. Nous pourrions écrire la même chose s’agissant des cycles. Pour figurer l’analogie, nous pouvons recourir au diagramme suivant.Ce diagramme n’est pas complet car toute représentation symbolique présente un degré d’imperfection. Le symbolisme est par nature imparfait car il ne forme qu’un moyen d’expression et non l’objet lui-même. Il est incomplet car il réduit. La manifestation, lieu du symbolisme, est le domaine de la dualité, partant de l’imperfection : seul est parfait ce qui est un. Une vue plus ordonnée correspondrait à ceci : Un principe se reflète dans un centre placé sur le plan de réflexion (figuré ici par un point sombre). La réflexion suppose un certain renversement des rapports entre le haut (ce qui dépasse notre état présent) et le bas (notre état présent), comme un miroir inverse l’image. En se regardant dans une pièce d’eau par exemple, le sujet regarde vers le bas tandis que son reflet semble regarder le haut. L’analogie s’applique ainsi en sens inverse, ce qui est symbolisé de diverses manières par les traditions. La figure de l’arbre inversé se rencontre ainsi fréquemment. Cet arbre, dont les racines plongent dans le ciel et dont feuillages et branches se déploient en bas, montre l’origine (les racines) placée en haut et le déploiement de ses possibilités (feuillage et branchage) en bas. Le tronc correspond à l’axe vertical assurant la continuité et le lien entre le principe et ses manifestations. Dans la manifestation sensible, reflétant un état supérieur, les arbres se présentent de manière inversée par rapport à leur prototype principiel : racines en bas et branches et feuillage en haut. Le reflet suppose également une certaine déformation, connexe de l’imperfection de ce qui est manifesté. Ainsi, la figure du cercle parfait ne se rencontre pas dans la manifestation. Les trajectoires des astres, par exemple, sont elliptiques. L’ellipse est obtenue en dédoublant le centre d’un cercle et en maintenant constante la somme des distances des points de l’ellipse avec les deux foyers (la somme des distances est analogue au rayon du cercle). Nous voyons que le propre du plan de réflexion est de dualiser, tout comme l’humain se dédouble entre homme et femme. »
Notre commentaire:
On ne saurait en effet ignorer la dimension analogique de l’Astrologie mais il y a plusieurs façons de traiter de cette notion, l’une (néo-platonisme) qui laisse entendre que ce qui est en bas est à l’image de ce qui est en haut (on retrouve cette notion dans le premier chapitre du Livre de la Genése, dans le Pentateuque où Adam est fait à l’image de Dieu), l’autre qui indique que A agit sur B, et donc si je connais A, je peux connaitre B.(Aristote). Mais pour notre part, nous avons une autre approche de l’Analogie, que l’on pourrait qualifier de « volontariste ».
Entendons par là que certaines sociétés se seraient construites en analogie avec certains signes célestes mais auraient déterminé de quels signes célestes l’on se servirait, à l’exclusion d’autres qu’on laisserait de côté. C’est cette mise de côté qui fait probléme pour la plupart des astrologues qui sont dans le « tout ou rien ». Or, rien n’oblige l’approche analogique à fonctionner de la sorte, de la même façon que si j’emprunte un élément à un ensemble, cela ne veut pas dire que je compte utiliser tout l’ensemble pour autant. De même que lorsque je rentre dans une pharmacie, je n’ai pas à consommer tout ce qui s’y trouve mais seulement ce dont j’ai réellement besoin.
Nous sommes d’accord avec Franck Nguyen pour dire que l’astrologie est une invention des humains (ce qui ne semble guère convenir à Roger Héquet qui déclare que l’Humanité est incapable de créer quoi que ce soit) mais si c’est le cas, l’Humanité à la façon d’un plasticien est libre de ne garder que ce qui lui semble utile. Pourquoi donc aurait-elle nécessairement-comme le croit un Jean-Pierre Nicola- voulu intégrer la totalité du systéme solaire dans son mode d’organisation sociale?
Selon nous, un choix aurait été effectué et cette notion de choix n’est pas non plus ‘audfible » par nombre d’astrologues qui ne voient pas selon quel critère on aurait pu « élire » telle planéte plutôt que tel autre, ce qui pourtant renvoie à la Bible et à la notion de « peuple élu », ce qui signifie par définition qu’il n’était pas le seul : beaucoup d’appelés et peu d’élus!
Selon la loi d’analogie, nous pensons que les astrologues d’autrefois- qui étaient des législateurs, des juristes (et l’on sait que la religion implique des « tables de la loi » ) et pas seulement des observateurs – décidèrent de porter leur choix, à la suite de « primaires », sur le candidat nommé Saturne parce que ses « chiffres » étaient en analogie avec ceux de la Lune, à savoir 28 ans environ pour 28 jours environ, ce qui donne 7 quand on divise par 4. En ce sens, la loi d’analogie ne fait nullement probléme sur un plan scientifique puisque c’est une initiative des sociétés sans rapport avec la réalité du cosmos, si ce n’est sur un plan purement visuel, ce qui explique que l’on pouvait tout à fait connecter Saturne avec certaines étoiles fixes, notamment le carré de celles que l’on appelle « royales » et qui furent choisies précisément parce qu’elles permettaient de diviser la course de Saturne en 4 périodes. de 7 ans, avec notamment le processus de la conjonction planéte/étoile. On parle évidemment d’une époque où les astronomes avaient appréhendé et décrit les révolutions des planétes, se déroulant sur un couloir appelé écliptique (ce qui renvoie à la formation d’éclipses des luminaires, ces derniers ayant été les premiers astres « mobiles » connus bien avant que l’on y adjoigne les planétes stricto sensu.
Autrement dit, les signaux célestes auxquels les humains -et notamment les femmes qui sont une interface entre les hommes et les astres mais ceci est une autre histoire- consentirent à se conformer étaient somme toutes fort peu nombreux et cela suffisait tout à fait pour les besoins de la cause, qui étaient organisationnels tout comme de nos jours s’établit tout calendrier électoral, sur une base plus abstraite.
Quant à l’analogie entre la carte du ciel et les humains, cela pose probléme et Barbault en 1961 ‘(De la psychanalyse à l’astrologie; Ed Seuil) remarquait que la complexité même du thème natal le prédisposait à rendre compte de l’intrication du psychisme individuel. Il y a là une sorte de raisonnement analogique à l’envers, du moins selon notre démarche, à savoir que ce ne sont pas les sociétés qui décident du ciel « utile » mais le ciel qui pris tel quel dans sa complexité nous enseigne ce à quoi il correspond analogiquement, d’où l’importance accordée par Franck Nguyen à l’astrologie « personnelle » alors même qu’il milite pour une astrologie inventée par les humains. A la rigueur, l’on peut admettre que cette astrologie de la carte du ciel, qui devrait ne tenir compte que des maisons astrologiques et non des signes zodiacaux, puisqu’elle est bien antérieure à la découverte des révolutions et fonctionne sur la seule rotation terrestre- lever culmination-coucher qui est une donnée de la conscience bien plus ancienne- a une fonction médicale puisque nous ne nous individuons que lorsque nous sommes malades et encore ponctuellement -Rappelons que l’astrologie horaire est antérieure à l’astrologie génétlhliaque (de naissance), ne serait-ce que parce que l’on ne gardait pas le souvenir du moment de la naissance.
Il nous semble important d’insister sur le rôle de la Tradition et ce à deux égards: d’une part parce qu’elle comporte certaines données très anciennes qui conditionnent jusqu’à notre mode actuel de fonctionnement et d’autre part, parce qu’il nous semble extrémement désinvolte de penser que nous pouvons de nos jours disposer des mêmes conditons que dans un passé très ancien. Certes, scientifiquement nous sommes, du moins en principe, comparativement des géants mais du point de vue de l’organisation sociale nous sommes des nains, c’est à dire – et cela va peut être changer dans l’avenir, que nous sommes incapables de nous reprogrammer nous -mêmes collectivement , n’étant capables d’améliorer que nos machines.. Or, l’astrologie, jusqu’à preuve du contraire, ne concerne pas des machines mais bien des humains.
Par ailleurs, les exemples d’analogie que fournir Franck Nguyen peuvent préter quelque peu à confusion: il est clair que le ciel n’a pu servir de réference pour les sociétés anciennes que sous une forme très simplifiée et épurée et certainement pas sous la forme brouillonne qui conduit au thème astral, lequel est censé refléter un ciel « brut », non retravaillée ou repensé. Or si l’astrologie est une invention des hommes, cela implique qu’elle ait été le résultat d’une structuration du ciel. Il est temps de comprendre que c’est le récepteur humain qui se détermine par rapport à ce qu’il garde du ciel et non qui est déterminé par le ciel.
On connait par ailleurs l’argument selon lequel ce que nous projetons sur le ciel pourrait n’être au fond que l’expression de l’influence exercerait sur nous. Or, nous pensons que le ciel est un objet protéiforme qui n’est nullement structuré par lui même et qui ne l’est que parce que les hommes en ont fait à condition bien entendu de comprendre que le ciel astrologique n’est pas le ciel astronomique, pas plus que la sculpture ne saurait se réduire au bloc de marbre dont elle est issue. Mais d’aucuns – ne diront-ils pas que cette sculpture était déjà inscrite dans le dit bloc tout comme ils soutiendront que la vie que nous nous construisons est déjà écrite (mektoub). Il y a là le syndrome d’un mépris de soi-même et des pouvoirs de l’Humanité qui est assez consternant mais qui précisément est fréquent chez ceux qui sont venus à l’astrologie – selon nous par erreur- en croyant que la philosophie de l’astrologie tend à humilier l’orgueil humain alors qu’au contraire, selon nous, elle le magnifie du fait même que l’astrologie en tant que réalité – et non pas seulement en tant que savoir- est son oeuvre de façon parfaitement consciente mais vouée à perdurer de façon subconsciente, ce qui est la seule façon d’expliquer – bien plus que comme le voudrait Franck Nguyen par le seul canal du culturel- que nous soyons directement ou indirectement impactés par certains signes que nos ancêtres décidèrent de privilégier et que nous captons alois même que nous ignorons tout de l’astronomie. Franck Nguyen semble oublier en effet à quel point l’astrologie serait mal lotie et bien peu de choses, si elle devait dépendre du zéle des seuls astrologues!!!
Certes, de nos jours, on risque d’être victime d’une erreur de perspective. Le chercheur en astrologie est bien obligé de considérer les faits astrologiques comme des données objectives sur lesquelles il n’a pas prise. L’astrologue actuel complétement marginalisé n’a rien à voir avec l’astrologue qui a construit l’astrologie, au sein d’une société sur laquelle il était possible de légiférer. Il importe de se replacer dans les conditions d’émergence de l’édifice astrologique et de laisser au vestiaire les données astronomiques dont les anciens n’avaient pas connaissance. En bref, il importe de replacer l’astrologie comme une tradition vivante, non point parce qu’elle évolue- sinon pour se corrompre comme un cadavre qui pourrit – mais parce qu’elle agit toujours en nous.
JHB
01 10 16
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